Whisky Pieuvre

Whisky Pieuvre

mercredi 21 juillet 2010

Triste époque pour la scène gériatrique

Ding. Dong. Aujourd'hui sonne assurément la fin de la crevaison de vioque en milieu hospitalier. On ne dira pas qu'on ne l'avait pas vu venir: depuis quelques années, malgré quelques trouvailles liées à la démocratisation de l'euthanasie, les connaisseurs (dont je suis) avaient bien perçu la lente déclinaison de tous ces ancêtres ininspirés à peine capables de manier la dernière phrase, tout juste aptes à bégayer un adieu, impuissants à spectaculariser leur cessation de vie par un flot d'hémoglobine inattendu ou un relâchement sonore des sphincters. Alors oui, bien sûr, les spécialistes (que je leade avec talent) s'y attendaient, mais tout de même, Phyllis Bourgain, vieille périgourdine (un peu d'exotisme était trop demandé) responsable de la fin du genre, a mis le paquet. Tout, dans son claquage, respire l'amateurisme: elle conserve son calme lorsque les médecins lui annoncent l'échéance, pas de larmes, absence totale de gémissements, acceptation franche et heureuse de la mort, quelques sanglots affreusement classiques probablement samplés sur une banque de sons au rabais lorsqu'elle apprend qu'aucun de ses enfants ne sera présent le jour J, dernières prières au dieu catholique -déplorable à l'heure d'Internet, du revival païen et de la présidence d'Obama-, petit râle académique qu'Hollywood la grande prostituée ne renierait pas, et enfin décès indistinctible, dans la solitude d'une chambre kitsch égarée quelque part dans la fin des années 80. L'élite (moi) frissonnerait si la clim' était digne de ce nom.
Je donne un point pour la surprenante purée d'hôpital dérobée à la défunte lors de ma visite sous fausse identité, malaxage de pommes de terre fade, infâme et absurde dans la pure tradition beckettienne. Le post-drone de la gastronomie.

1/10

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