Whisky Pieuvre

Whisky Pieuvre

jeudi 29 juillet 2010

Triste époque pour la bande originale

Paris. Le jour. Soleil aveuglant. La foule autour de moi se presse et croit m’engloutir avec elle alors que je marche sur les chapeaux de ces moutons indiscernables ; sans le comprendre ils me soutiennent sur leurs médiocrités et me portent aux nues, abaissent infiniment le niveau et me laissent seul à celui de la mer. Certaines mauvaises langues prétendront que c’est pour le seul plaisir de toiser le peuple que je me suis rendu au cinéma Gaumont Parnasse (aux bigarrures et fréquentations éminemment front pop’) et que j’y ai constaté l’horreur décadente hollywoodienne de l’Inception de C. Nolan ; mais ces langues-là oublient que mon moteur de vie est la seule vérité, la pure, l’unique, celle qui tire sur tout ce qui bouge depuis son loft varsovien en choquant son verre de whisky pieuvre contre celui d’un peintre non moins polonais et tout aussi renfermé.
Qu’on se rassure : je ne chroniquerai pas ici le film ; au même titre que je ne me mêle pas des agissements de notre police qui s’attache souterrainement à éliminer la racaille communiste, je laisse l’indispensable démolition des œuvres d’arts à mes vagues confrères pigistes et webzineurs.
Ma critique vise plus haut et plus loin, mes corrosions s’attaquent aux grands concepts, elles liquéfient les mondes et désolidarisent les galaxies.
Car au-delà de l’ineptie du scénario de Christopher N., derrière sa pompeuse bande originale, une question se pose et aurait dû se poser dès l’origine de cette merveilleuse idée pas trop mal et gâchée qu’est le cinéma : d’où vient cette manie de bandoriginaliser les films ? Quel protocinéaste reître de Babylone a pu avoir l’idée d’appliquer aux images filmiques une musique supposée aider la narration ? La question reste en suspens et le coupable en levant timidement la main héritera de la note qui conclut cet article.
Pour moi, l’artiste (oublions le « pour moi », en fait) est un guerrier solitaire, un champion, un performeur. Peu importe ce qu’il fait ressentir (au fond, qui a déjà ressenti quelque chose devant un film ?), on n’attend pas de l’artiste un sentiment mais une preuve. De sa puissance, de sa sensibilité, de sa capacité à faire ce que le lambda n’ose même pas percevoir. Mais la réalité, elle aussi à la solde du grand capital, en a décidé autrement pour son cadet des salles obscures et n’a produit que des demi-portions sans autonomie affublées de casquettes délavées et de barbes incohérentes. Que des adolescents tardifs aux lacrymales encore incontinentes me brandissent en réponse la sacro-sainte émotion ; je leur démontrerai avec joie l’inexistence du concept. La beauté, mes enfants, est dans l’analyse, dans la flatterie mutuelle de l’exhibitionniste et du voyeur. Montrez-moi vos nombrils et je les noterai ; et l’art s’arrête là, artistes et critiques y ont chasse gardée, c’est l’apanage des grands esprits et ils ne se rencontrent sûrement pas dans la vacuité de performance du cinématographe.
Me voilà maintenant, emporté par ma prose, à chroniquer le cinéma dans son ensemble et son histoire ; à l’origine je voulais seulement écrire un papier sur le manque de goût vestimentaire du clochard qui mendiait platement à la sortie, mais petit à petit le goût du grandiose m’a fait glisser vers la bande originale et enfin le septième soi-disant art. Soit. La vérité devait parler et elle l’a fait. La note qui suit est polyvalente : elle évalue le film de C.N., la prestation de Leonardo D.C., le concept de bande originale, l’idée du cinéma…

1/10

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